5 novembre, 2024

Des Etats Généraux de la Démocratie territoriale……

Pour avoir écouté François Hollande parler aux élus locaux en clôture de biens superficiels « Etats Généraux », j’en retire une inquiétante leçon. Cet homme est résolument décidé à ne rien faire, comme si tout pouvait se prolonger sans être remis en cause à aucun moment.

Certes, il y eut parfois l’esquisse de l’esquisse d’un diagnostic sincère et utile ; par exemple lorsqu’il constate que depuis 20 ans les dépenses des collectivités locales ont progressé chaque année de plus de 3%, bien au-delà de la croissance du PIB. Mais les causes et conséquences de cette irrésistible marée de la dépense publique locale ne sont pas approfondies. Elles n’ont donc aucune perspective d’amélioration. Un constat qui cependant a fait murmurer à sa gauche « C’est du Sarkozy dans le texte». C’est donc, hélas, un constat sans conséquences, alors que les signaux d’alerte sont allumés depuis près de 20 ans en matière de dépenses publiques.

Pour l’essentiel, c’est un conservatisme noyé dans la bonne conscience avec de surcroit deux incongruités.

Conservatisme parce qu’aucune réforme de structure n’est envisagée, si ce n’est, et l’on doit s’en réjouir, un statut renforcé des Agglomérations. Mais si l’on ne va pas, comme le voulait Edouard Balladur en la matière, vers une véritable unité, nous resterons dans le registre des intentions grandiloquentes de Pierre Mauroy, qui s’évanouissaient dès que l’on imaginait pour les agglomérations, des fusions communales dans les travaux du Comité Balladur.

Conservatisme parce que le rapprochement Département/Région que nous avions organisé à partir des nouveaux élus communs aux deux niveaux, les conseillers territoriaux, est abandonné.

Conservatisme habillé des mots : confiance, cohérence, clarté. Ces mots utilisés par François Hollande consacrent en vérité le statu quo actuel, en annonçant comme projet, ce qui existe déjà : expérimentation, chef de file, compétences sociales des Conseils Généraux et compétences économiques pour les Régions. Pas nécessaire de faire une loi pour cela !

Par ailleurs, il propose deux incongruités : le Haut Conseil des Territoires d’abord, projet phare du Gouvernement, qui illustre le mot de Clémenceau « Vous ne voulez rien faire, faites une commission ». Plus les titres ont de l’emphase, plus les actions  sont modestes. Ce lieu de rencontre existe : c’est le Parlement et particulièrement le Sénat. Encore faudrait-il consolider ce cumul raisonnable qui est la règle acceptée aujourd’hui d’un mandat national et d’un mandat local.

On imagine les relations faciles d’un Haut Conseil, conservateur des structures existantes, et d’un Parlement dont les élus n’auraient pas ou plus d’expérience locale. C’est absurde et accessoirement coûteux.

La deuxième incongruité réside dans ce projet des Conseillers Généraux élus par couple – ceux-là hétérosexuel au nom de la parité – dans des cantons sans doute regroupés. Qui aura été élu des deux ? Qui pourra parler et au nom de quelle partie des cantons : dans l’administration locale, nous avions parfois Courteline, nous aurons souvent Labiche ou Feydau. Peut-on aimer les territoires et se moquer ainsi de leur représentation ? Si le Parti Socialiste tient à la parité, qu’il s’oblige lui-même à n’investir pour les départements que des candidatures « équilibrées ».

On banalise le genre pour le mariage, on le sacralise pour l’élection : laissons les Français choisir librement. Les partis qui oublient les femmes commettent une faute et une erreur. Qu’ils soient sanctionnés certes mais épargnions-nous les artifices absurdes, sinon à quand une vice-présidence nationale de sexe opposé, ou pourquoi pas la règle qu’après un Président d’un sexe défini, ne pourraient pour sa succession ne se présenter que des candidats du sexe différent du sortant.

Avec Nicolas Sarkozy et François Fillon nous avions choisi une architecture forte. D’un côté le bloc communal et intercommunal avec une règle : toutes les communes sont respectées mais toutes les communes doivent travailler en interco et nous y sommes parvenu. En revanche, les intercommunalités étaient libres de s’adapter aux réalités du terrain. De l’autre côté, un bloc Département/Région dont l’entente était scellée par la création du conseiller territorial là encore les coopérations étaient libres et adaptées. Sur ce deuxième point et ce deuxième point seulement, les socialistes reviennent en arrière par manque d’audace, par manque de réalisme, par conservatisme. C’est navrant, mais c’est exactement ce qui les caractérise.

Rendre hommage aux territoires est aussi utile qu’estimable, je le pense profondément. Mais boucler durant l’été une réforme et bâcler en quelques heures des sujets qui mériteraient la mobilisation de nos institutions n’est qu’un hommage superficiel, au mieux, ou une caricature de démocratie participative, en vérité. Le CESE, le Sénat et l’Assemblée sont faits pour étudier les textes qu’un Gouvernement de son côté accepterait de voir amendés au terme d’une période de débats conduits par nos élus nationaux.

Paraphrasant Gide je conclurai, les bons sentiments ne suffisent pas à faire les bonnes réformes. Il n’y a pas de bon vent pour le navigateur qui ne sait pas où aller. Le Gouvernement n’a pas choisi  son cap, comme Nicolas Sarkozy et François Fillon avaient eu le courage de le faire.  Choisir n’est pas un acte familier au Président et les collectivités locales vont en souffrir comme d’ailleurs tous les secteurs en crise de notre Société.

 

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