6 novembre, 2024

Six questions du CESE Région Lorraine à Gérard LONGUET

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La réforme territoriale

Les deux projets de loi relatifs à la réforme territoriale présentés en Conseil des Ministres le 18 juin dernier n’ont pas manqué de susciter de nombreuses d’interrogations quant aux conséquences susceptibles d’en découler pour nos territoires.

A cet égard, le CESE de Lorraine a mission, via son Groupe de Travail « Alsace Lorraine : les conditions de la réussite » de définir ce qui, tant en termes de méthode que de résultats, pourrait contribuer à la réussite du projet.

Le CESE Lorraine m’a donc posé, à ce titre, 6 questions en ma qualité de membre de la Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (lors de mon audition, le 28 août dernier).

1 – Le millefeuille est-il une réalité en France et si oui quelles économies peuvent être faites ?

Tous les états européens de grande taille, sauf peut-être la Grande Bretagne, ont trois étages de collectivités locales. Derrière l’apparence des 36 000 communes il y a la réalité de 2 400 intercommunalités dont le rôle est croissant. Certes, il y a 100 départements, mais qui croit que l’on ira de Verdun à Strasbourg pour régler une question de transports scolaires. La proximité est nécessaire.

Le vrai problème est de spécialiser chaque niveau et de limiter à deux intervenants les cofinancements. Nous l’avions commencé avec le Gouvernement Fillon, le Gouvernement Ayrault a organisé le désordre hier pour le déplorer aujourd’hui avec Valls !

2 – La fusion des Régions est-elle susceptible de créer des dynamiques ?

Oui, pour celles qui ont la chance de disposer d’une grande métropole, et cette dernière en sera le principal et peut-être le seul bénéficiaire à la tête de sa grande région. Les autres territoires des Grandes Régions payeront pour l’honneur de disposer d’une « Capitale de taille européenne ». Concrètement, par exemple qu’en sera-t-il des villes moyennes ou petites, des pays ruraux ? Ou les moyens sont concentrés sur la « locomotive » et ils auront peu, ou ils sont répartis, alors pourquoi changer ?

 3 – Quelle devrait être la place de l’Etat ?

L’Etat n’a plus d’argent depuis 20 ans et pour plusieurs années. Il aura donc la tentation de transférer aux grandes régions des grands services, par exemple les personnels de l’enseignement. Mais il est incapable de financer plus d’investissements et il y a longtemps qu’il ne joue qu’un rôle défensif en matière d’emplois industriels. Tant que le Budget de l’Etat n’aura pas retrouvé l’équilibre il ne pourra ni financer la solidarité ni accompagner les grands projets.

4 – Comment garantir de la proximité et de la cohésion sociale et territoriale ?

C’est l’inconvénient majeur de cette réforme : les élus de terrain ont besoin d’interlocuteurs responsables accessibles et donc proches. Ils n’iront pas facilement à Strasbourg. De plus, pour le développement économique de la Meuse, je préfère aller à Paris c’est plus près et les décideurs s’y trouvent, privés ou publics.

5 – Quels moyens financiers sont nécessaires pour soutenir une région ALCA en difficulté par rapport à d’autres régions ?

Depuis 1992, les Gouvernements successifs ont repris aux Régions leurs marges budgétaires en remplaçant des impôts locaux décidés librement par les Conseils Régionaux par des dotations venues de l’Etat. Mais ces dotations, en réduction d’ailleurs, perpétuent la pauvreté des aides de l’Etat et ne peuvent donc pas combler les inégalités. Les Régions pauvres ne sont pas plus aidées que les autres et les Régions riches de leurs activités économiques n’en profitent plus pour progresser car elles n’ont pas le droit d’utiliser leurs atouts.

Enfin, tout changement de périmètre de Région, de toute façon, ralentira l’action des « fusionnés » le temps de tout mettre en place. La Bretagne qui, elle, ne bouge pas, l’a compris.

6 – Quel avenir pour le transfrontalier dans ce nouvel ensemble ?

C’est le principal atout d’une grande région « ALCA » de Zurich à Bruxelles. Oui, à condition de pouvoir négocier librement avec nos voisins. Or, cela reste le privilège de l’Etat : pour parler au Luxembourg, nous devons officiellement passer par le Préfet qui lui parle au nom de l’Etat. C’est pour cela que la ville nouvelle d’Esch-Belval ne se développe pas en France, car Bercy ne veut pas que les avantages Luxembourgeois soient accessibles à des entreprises qui seraient implantées du côté français.

En conclusion, je ne suis pas certain que ce projet ira jusqu’au bout, car l’improvisation du Gouvernement n’a d’égal que le scepticisme des élus compétents, droite et gauche réunies.

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