29 mars, 2024

L’absence de masque est le résultat des déficits de l’État

Le Président Macron a raison, chaque chose en son temps et d’abord vaincre le Covid-19. La France a su par le passé, gagner des batailles en apparence mal engagées. Ancien Ministre de la Défense, j’ai en tête mot à mot l’ordre du jour du Maréchal Joffre ouvrant la bataille victorieuse de la Marne : « Une troupe qui ne pourra avancer devra se faire tuer sur place plutôt que de reculer ». Le Gouvernement nous demande un effort moindre, il suffit de rester chez soi. Nous devrions y parvenir !

Mais comme le Président Macron nous dit également que demain ne sera pas comme avant, il nous oblige à réfléchir. Deux pays déjà nous font la morale, la Russie et la Chine, qui de concert, exaltent les vertus de leur dirigisme énergique. Là encore, attendons la fin de la guerre pour en connaître le prix exact dans ces deux grandes nations. Mais les communiqués triomphants sont à cet instant, prématurés et malvenus.

En France, on redécouvre à la fois des vertus à l’État, tout en constatant une faiblesse logistique surprenante en ce qui concerne un matériel de base de sécurité, les masques principalement. Certains imaginent déjà le procès du capitalisme libéral, alors que ce sont des entreprises –  grandes, très grandes ou parfois petites – qui dans la rapidité et avec imagination, achètent, acheminent, adaptent ou fabriquent ce qui nous manque.

Oui, trois fois oui au secteur hospitalier public, mais tous les Préfets sur le terrain savent qu’il faut mobiliser la médecine « de ville » et l’hospitalisation privée. Dans le Grand Est, Jean Rottner en donne l’exemple parfait.

Pour les masques absents en début de bataille, il faut revenir sur une évidence : un état trop déficitaire rogne toujours sur le « Régalien », et surtout lorsque ce « Régalien » apparaît comme faisant face à une charge jugée hypothétique.

Oui, la Commission des Finances du Sénat en son temps, a examiné la gestion de la crise du H1N1, par Madame Bachelot, à l’occasion de l’examen de la Loi de Règlement du Budget 2009, dépense évaluée à 1 milliard d’Euros dont 150 millions pour les masques. Le Gouvernement en tire des conséquences de restriction et notamment le 2 novembre 2011 dans une instruction ministérielle, concernant sa stratégie dans les situations exceptionnelles. Seule la réalité des déficits de l’État explique que celui-ci ait demandé et obtenu une réforme de l’achat des masques, réforme qui nous laisse aujourd’hui désemparés. Madame Touraine, Ministre, entérine une politique antérieure à sa nomination et le Parlement vote un dispositif qui est le contraire de ce que demandait pourtant l’Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST) en 2005, au travers du rapport du Député DOOR et de la Sénatrice BLANDIN. En un mot, le « Régalien », et tout particulièrement lorsque le risque parait aléatoire, sera toujours sacrifié par l’État, parce que ce dernier est lourdement déficitaire. Il choisit l’opinion de l’instant plus que les rendez-vous de l’avenir. Pour rétablir le « Régalien » et garder des réserves, on attend de L’État qu’il puisse investir, fût-ce inutilement en apparence.

La guerre, oui, est de la responsabilité de l’État. Mais l’armement des troupes et leur entraînement ne sont accessibles, lorsque l’on a une monnaie partagée qui ne permet ni l’endettement excessif, ni a fortiori l’inflation – impossible – qu’aux seuls états dont les budgets ont des marges. D’autres, et non des moindres en Europe y parviennent. Il faudra donc accélérer l’effort de redressement financier au moment où l’actualité dans un monde qui reste tragique, nous rappelle que l’État ne peut nous protéger que s’il s’en est donné les moyens.

Gérard Longuet – 01.04.2020

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