29 mars, 2024

Réactions suite à la mise en examen de Nicolas Sarkozy

D’abord et avant tout, contrairement aux apparences un ancien Président de la République n’est pas, heureusement ou malheureusement pour lui, un homme comme un autre. Parce qu’il a exercé, en raison de la confiance des Français, des responsabilités considérables, il continuera bien après son mandat de susciter des réactions hors du commun liées à l’exercice de son mandat.

Doit-on le laisser seul et sans protection particulière ? Non, naturellement. Au plan matériel, la République lui reconnaît des droits pratiques dont disposent à une échelle moindre les anciens Premiers Ministres. Ce sont les seules personnalités politiques à bénéficier de tels appuis. C’est ainsi et cela n’est pas contesté que je sache.

Mais au plan juridique ne doit-on pas tenir compte de ce que bien des attaques dont Nicolas Sarkozy fait l’objet sont directement liées à l’exercice de son mandat. La loi devrait en tenir compte. Les deux magistrats qui ont placé sur écoute le Président Nicolas Sarkozy l’ont fait au titre d’un soupçon émis à l’origine par Kadhafi d’avoir reçu un financement libyen lors de sa campagne présidentielle de 2007.

Chacun se souvient du contexte de cette attaque de Kadhafi : elle répondait à la coalition fédérée par le Président Français pour l’empêcher de mettre à exécution ses menaces sanguinaires.

L’ouverture d’une instruction contre Nicolas Sarkozy dans ce contexte est une victoire posthume offerte par la Justice Française au dictateur Libyen !

Placé sur une écoute exhaustive, Nicolas Sarkozy apparaît préoccupé de l’Affaire Bettancourt. Il n’était pas nécessaire de l’écouter pour le savoir. On apprend que son avocat s’informe de l’état de l’instruction, directement et indirectement, la belle affaire, c’est son rôle. On parle d’échange d’informations contre des promesses ! Autant déclarer qu’il est désormais interdit de parler à un magistrat, car nous pouvons tous être soupçonnés de monnayer une promesse contre une parole. Or, à moins d’être constaté par un texte, un paiement ou un accord verbal explicite, le trafic d’influence et la corruption reposent sur une subjectivité des juges.

Etre puissant n’est pas sans inconvénient : si vous parlez à un policier vous semblez exercer une pression, voire une menace. Si vous parlez, même indirectement, à un magistrat vous risquez d’être frappé par la formule prêtée à Clémenceau « Un magistrat indépendant, oui s’il est Premier Président de la Cour de Cassation et encore s’il est aussi Grand Croix de la Légion d’Honneur ».

Chacun mesure que cette affaire pourrira la République qui va se terminer comme Clearstream se termina. Mais le mal aura été fait et la grande victime, outre Nicolas Sarkozy et ceux qui lui ont fait confiance, sera la République.

C’est elle la grande oubliée du débat. Tout Président a vocation à être un jour ancien Président. S’il peut alors être la victime tardive de ses adversaires d’hier quelle sera l’autorité pour le Président en place. Il fallait y songer avant de décréter que Nicolas Sarkozy n’étant pas au-dessus des lois, les magistrats instructeurs pouvaient lui infliger une humiliation qu’ils se sont bien gardés d’imposer à un Ministre en exercice, délinquant avoué selon ses propres déclarations. Cette humiliation ne frappe pas seulement l’homme qui ne le mérite pas mais l’institution qu’il a animée et incarnée.

A cet instant, je crois les Avocats et leurs Bâtonniers capables de rétablir les droits de la défense. L’action publique n’a pas à être appropriée par tel ou tel  aussi diplômé soit-il. Elle s’inscrit dans des règles de droit et d’opportunité. Le Gouvernement a estimé qu’il était opportun sur la base des accusations de Kadhafi de persécuter un homme en espérant qu’il finirait par trébucher. Ce faisant, il sape l’autorité qui fonde notre paix commune. On ne peut que s’attrister et s’inquiéter.

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